Dislocation
Je vous aurai bien balancé toute une histoire sur la soirée de samedi, dans un superbe appart derrière le Taj Hotel à Colaba, comme quoi j’ai papoté avec une fashion designer qui habille Madonna et Vanessa Paradis (entre autre...), que je veux un cocktail boy à disposition 24h/24 à la maison (miam… Kiwi margarita or peach and abricot breeze, miss?!) et que encore une fois les filles et moi on avait trouvé un super plan et qu’on passait une très très chouette soirée grâce à l’armateur rencontré au KFC.
Jusqu’à la fin. C’est là où tout a dérapé.
La fête se finit, tout le monde part et quitte l’appartement. Les filles et moi sommes les dernières, nous remercions KFC Sir, et il nous accompagne jusqu’en bas pour que son chauffeur nous ramène toutes jusque chez nous (oui, oui, fête à l’autre bout de la ville avec chauffeur on duty pour ramener les poulettes at home.. !). En bas, Zeynep s’aperçoit qu’elle a oublié son pull en haut. On grimpe toutes les deux le chercher et on laisse Sara et Valou en bas. 2 minutes, pas plus.
En retournant en bas, on voit KFC Sir qui se tient le bras, la main qui pend et qui visiblement a très mal. Il n’arrête pas de dire « the guy just pulled my arm out! Take me to hospital!! Hospital!! Quick !!».
Hein? Qu’est-ce qu’il se passe? Sara et Valou ont l’air complètement interloquées et elles l’aident à aller vers la voiture. On s'entasse dans la voiture, direction les urgences.
Sara et Valou nous expliquent qu’il s’est battu avec un des gars qui était à la soirée (complètement crétin, un abruti fini qui se prenait pour un pseudo Sean Paul et qu’on avait à peine calculé tellement il n’en valait pas la peine.). Ils se sont disputés en hindi et ça a dérapé super vite, ils se sont empoignés et KFC Sir s’est retrouvé avec l’épaule déboîtée.
‘tain mais c’est quoi ce bordel ??
Arrivée aux urgences mouvementée, je vous laisse imaginer, 4h du mat, un indien qui a un bras déboîté, 4 blanches… Il est pris en charge tout de suite (heureusement) et l’orthopédiste arrive en moins de 10 minutes pour lui remettre l’épaule en place. C’est là que je suis sortie et que j’ai fait game over, parce que le cri du mec à qui on remet une épaule en place, je ne souhaite à personne de l’entendre. Les filles étaient dans le même état que moi.
On était entre le fou rire nerveux et la crise de larmes hystérique. On a donc opté pour la solution fou rire, ce qui, je l’admets, n’est pas classe, mais alors pas classe du tout, mais en tout cas, ça a permit de relâcher un peu la tension. On a remis en perspective tout ce qui s’est passé et on s’est dit que finalement, ce n’était pas si grave, que tout allait bien se passer.
KFC Sir sort finalement des urgences et il s’aperçoit qu’il n’a plus son portable. Ah, ça tout à coup, c'est moins drôle. Il l’avait donné à son chauffeur en arrivant, qui dans la confusion, l’a repassé à quelqu’un, pensant que c’était une de nous quatre. Manque de bol, ce n’était pas nous… Et là, on a beaucoup moins rigolé, parce que ce portable servait d’ordinateur à KFC Sir et qu’il avait toutes ses données professionnelles à l’intérieur, des plans de chantiers navals en projet et en construction, des données confidentielles etc.… Evidement, aucune sauvegarde sur un autre PC, mais ce n’était pas de moment de lui faire des reproches pour ça.
On retourne aux urgences, on inspecte toutes les pièces où il est passé, grand moment s’il en est : «non, non, rentre pas là, ils ont mis un mort dedans, rentre pas, jte dis, ya un mort!!! Haaaaa, il bouge!!!» mais rien, niet, pas de portable. On essaie de l’appeler, mais il est éteint. C’est évident que quelqu’un s’est servi au passage… et merde ! Valou est encore persuadée aujourd'hui que c'est le mort sous le drap qui a le portable.
Et finalement, on apprend aussi le fin mot de l’histoire, pourquoi KFC Sir s’est disputé et battu avec le gars de la fête.
En fait, ce gars s’était incrusté. KFC Sir ne le connaissait pas, mais il n’a pas voulu faire de scandale pendant la fête, donc tant que ce type se tenait bien, il n’a rien dit. En revanche, quand il l’a vu attendre comme un kakou en bas de l’immeuble à la fin de la soirée, il est allé lui demander ce qu’il faisait là. «J’attends les filles, j’ai bien l’intention d’en ramener deux avec moi ce soir.» KFC Sir lui a répondu que non, ce soir nous étions sous sa responsabilité et que nous rentrions avec son chauffeur. Au pire, il prenait nos numéros et que ce qu’il se passerait demain ne le regarderait pas. L’autre gars a fait des commentaires déplacés, le ton est monté, le jeune a mis KFC Sir au défi, un «casse-toi, pauvre con» a fusé et vieille fierté indienne, les coups sont partis et l’épaule aussi.
Evidement, quand nous avons compris pourquoi tout cela est arrivé, nous étions encore plus gênées. Et aussi un peu fâchées, car nous sommes tout à fait capables de nous débrouiller toutes seules, et nous aurions très bien pu envoyer bouler le Sean Paul de pacotille nous même et avec beaucoup moins de dégâts. Mais ici, ça ne fonctionne pas comme ça. Mais ya pas photo, en tant qu’occidentales à Bombay, nous attirons les problèmes, certains indiens se font une idée de nous totalement fausse et pensent qu’ils peuvent tout se permettre avec nous. C’est bien malheureux, mais ça fait un peu partie de notre quotidien.
Bon, la prochaine fois, on prend les mecs avec nous!
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